mercredi, septembre 21, 2005

Hagakure : le livre sevret des Samouraïs


L’histoire même du présent livre est un roman. Dans le Japon impérial de la fin du XVIIème siècle, le samouraï Jocho Yamamoto voulut se suicider rituellement pour suivre dans la mort son seigneur Nabeshima Mitsushige.
Or, un décret impérial venait de paraître pour interdire cette coutume particulièrement coûteuse en vies humaines ; obéissant à ces nouvelles règles, Yamamoto obtint le droit de devenir moine et de se retirer du monde. Il vécut dans une hutte, solitaire, dans le silence et la méditation. Un jeune lettré, venu le visiter, rendit compte des conversations qu’il eut avec Yamamoto sur l’esprit et la morale des samouraïs. Il en fit un manuel d’enseignement du combat et de l’esprit aristocratique à l’usage exclusif des nobles. Cet ouvrage secret (Hagakure signifie littéralement, caché dans les feuillages), se transmit de père en fils jusqu’au vingtième siècle. Ce n’est qu’alors qu’il parut pour la première fois au Japon dans une édition accessible au grand public. Comme on peut facilement le concevoir, Hagakure devint l’un des livres de chevet du grand Mishima. Si l’on ne tient pas compte de l’horrible couverture, qui a à peu près autant de rapport avec l’esprit du livre qu’un double hamburger avec la cérémonie du thé, on découvrira ici, grâce à une traduction assez fine, deux tomes de l’un des textes les plus étonnants qui soient. D’une part, parce qu’il s’agit d’aphorismes sur la violence et sur la mort, écrits dans une langue souple et ironique, dans un pays qui ne respecte ni la violence ni la dérision. D’autre part, parce que l’on retrouve cet esprit, bien que modifié et « civilisé », dans la tradition japonaise contemporaine, notamment dans le monde cruel de la grande entreprise. Hagakure établit également un lien évident avec le Kill Bill de Tarantino, le GhostDog de Jim Jarmusch et certains caractères de tueurs implacables chez Takeshi Kitano (je pense plus précisément à sa reprise en 2003 du film-culte Zatoichi). Un grand livre en définitive. Permettez-moi de vous offrir en cadeau ce petit aphorisme pour la route : "Si on décide de trancher des têtes, il faut le faire absolument sans erreur".

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